Le démembrement de propriété en LMNP : définition et droits respectifs de l’usufruitier et du nu-propriétaire
Le démembrement divise la pleine propriété d’un bien en deux parties distinctes : l’usufruit, qui combine le droit d’utiliser le bien (usus) et d’en percevoir les loyers (fructus), et la nue-propriété, qui confère uniquement le droit de disposer du bien (abusus). En LMNP, l’usufruitier devient donc le gestionnaire indépendant du logement meublé, capable de le louer librement, percevoir les loyers et prendre en charge toutes les obligations locatives sans avoir besoin du consentement du nu-propriétaire.
De son côté, le nu-propriétaire ne peut ni utiliser le bien ni percevoir les revenus générés pendant la durée du démembrement. Toutefois, il conserve le droit de vendre sa nue-propriété séparément, ce qui peut constituer une stratégie patrimoniale intéressante, et profite de la valorisation future du bien lorsqu’il récupérera la pleine propriété.
En cas de vente du bien démembré, la transmission de la pleine propriété nécessite l’accord des nus-propriétaires et usufruitiers. Cela étant dit, chaque partie peut céder ses droits distinctement, offrant une certaine flexibilité dans la gestion de l’investissement immobilier.
Obligations fiscales et fiscales en LMNP démembré : rôles distincts de l’usufruitier et du nu-propriétaire
Il est crucial de distinguer les responsabilités fiscales entre usufruitier et nu-propriétaire.
Imposition de l’usufruitier
L’usufruitier inscrit les revenus locatifs dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux (BIC) et règle l’ensemble des impôts correspondants liés à la location meublée, y compris la taxe foncière ainsi que la taxe d’habitation. Il assume donc la charge fiscale de la gestion du bien dans le cadre du LMNP.
Exonération du nu-propriétaire
À l’inverse, le nu-propriétaire est exempté d’impôts sur les revenus locatifs et n’a pas à régler les charges fiscales courantes telles que la taxe foncière ou l’Impôt sur la Fortune Immobilière (IFI), puisqu’il n’utilise pas ni ne perçoit les revenus du bien pendant le démembrement.
Amortissement en usufruit : une avancée juridique majeure
Une jurisprudence récente du Conseil d’État en 2019 valide désormais la possibilité pour l’usufruitier de pratiquer l’amortissement comptable sur la valeur de l’usufruit viager. Cette reconnaissance permet d’optimiser la charge fiscale des revenus locatifs en LMNP démembré, en conservant le bénéfice de l’amortissement, élément clé du régime réel.
Calcul de la base amortissable
La base amortissable se calcule selon l’espérance de vie restante de l’usufruitier, en référence aux tables de mortalité de l’INSEE (article 669 du Code général des impôts). Cette méthode ajuste la durée et la répartition des amortissements, adaptée à la nature viagère ou temporaire de l’usufruit.
Répartition des charges et travaux entre usufruitier et nu-propriétaire en LMNP
Conformément aux articles 605 et 606 du Code civil, la gestion des charges et réparations est très clairement partagée dans le cadre du démembrement :
- L’usufruitier assure les frais d’entretien courant, les réparations locatives ainsi que toutes les obligations destinées à maintenir le bien en bon état, ce qui est indispensable pour la continuité de la location meublée.
- Le nu-propriétaire supporte uniquement les grosses réparations liées à la structure et à la solidité de l’immeuble : toiture, murs porteurs, façade. Ces travaux majeurs sont exclusifs à sa responsabilité, sauf faute manifeste ou défaut d’entretien imputable à l’usufruitier.
Cette répartition protège le nu-propriétaire en limitant son engagement financier immédiat tout en garantissant que le bien sera restitué en bon état à la fin du démembrement.
Par ailleurs, l’usufruitier prend en charge le paiement de toutes les taxes afférentes au bien : taxe foncière, TEOM, taxe GEMAPI, ou encore la cotisation foncière des entreprises (CFE). Cette responsabilité fiscale impacte sa rentabilité mais lui confère également la gestion complète du bien en tant que bailleur.
Transmission et succession : avantages fiscaux du démembrement de nue-propriété en LMNP
Le démembrement est un levier essentiel d’optimisation fiscale et patrimoniale dans le cadre du LMNP :
Avantages fiscaux sur les donations
La donation de la nue-propriété à ses enfants bénéficie d’un abattement renouvelable de 100 000 € par parent et par enfant, applicable tous les 15 ans. Cette exonération s’applique uniquement à la valeur de la nue-propriété, ce qui réduit notablement la base taxable aux droits de donation.
Optimisation de la transmission
Le mécanisme permet de dissocier les droits entre usufruitier et nu-propriétaire. Typiquement, le conjoint survivant bénéficie de l’usufruit viager du bien meublé, assurant son droit d’usage et la perception des revenus locatifs, tandis que les enfants héritent de la nue-propriété. Cette répartition conjugue protection du conjoint et transmission équitable.
Préparation à la succession
Le démembrement encadre également l’organisation successorale, permettant d’anticiper la transmission de patrimoine tout en facilitant la protection des ayants droit. Il réduit par ailleurs l’assiette taxable à l’Impôt sur la Fortune Immobilière (IFI) pour le nu-propriétaire, dont la base d’imposition ne comprend que la valeur de la nue-propriété.
Conditions légales et bonnes pratiques pour exercer légalement le LMNP en démembrement
Pour sécuriser et maximiser les avantages du LMNP démembré, voici quelques recommandations pratiques :
- Veillez à la gestion intégrale par l’usufruitier : celui-ci doit piloter la location meublée, gérer les baux, l’entretien, répondre aux normes de sécurité et déclarer les revenus sous le régime réel du LMNP.
- Évaluez précisément la valeur de l’usufruit : selon que l’usufruit soit viager ou temporaire, ce calcul influence la base et la durée des amortissements comptables, impactant la fiscalité effective.
- Le nu-propriétaire doit rester vigilant : contrôler régulièrement l’état du bien et le suivi des obligations locatives par l’usufruitier, notamment en matière de réparations lourdes et grosses charges.
- Formalisez juridiquement le démembrement : par des actes écrits clairs précisant les modalités de gestion, les conditions de cession des droits, et prévoyant un accompagnement fiscal et patrimonial avec des experts.
- Adaptez la durée du démembrement (viager ou temporaire) : selon vos objectifs successoraux et patrimoniaux pour tirer pleinement parti des avantages fiscaux et gérer efficacement l’investissement LMNP.
Ces bonnes pratiques évitent les malentendus, sécurisent les parties et optimisent la rentabilité et la gestion fiscale du bien démembré en LMNP.
